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Version 3.0

"Mais bon sang ! Tu te rends compte que ces derniers mois, on te côtoyait sans nous rendre compte de rien ! A te voir, on dirait un mur, un mur de bunker inébranlable, alors qu’en réalité, c’est le chaos, le big bang originel dans ta tête, et en permanence ! Tu sais qu’il y a des gens qui tiennent à toi et qu’ils sont là si t’en as besoin, hein ? Est-ce que tu tiens un journal intime au moins ?"

C’est à ce moment-là de la tirade de V. que je me suis souvenue, en un éclair, de ce site et du journal que j’y ai tenu un très court laps de temps. Mon éternelle curiosité oblige, je suis revenue. Me voilà donc, lisant les quelques lignes que j’ai publiées ici. Mais était-ce vraiment moi ? J’ai l’impression de me reconnaître dans ces phrases, de comprendre de quoi elles parlent, de me souvenir des situations citées. Et pourtant… je ne les sens pas comme étant miennes. Comme si les souvenirs appartenaient à quelqu’un d’autre. Peut-être qu’elles appartiennent à cette version 1.X de moi-même que je voulais fuir au profit de la 2.0. Cela veut-il dire que j’ai finalement pu passer de l’une à l’autre ?

Les choses, ma personne, mon environnement ont-ils changé tant que ça, en 3 ans ?
Si je devais citer uniquement un changement notable, cela serait certainement ma rupture avec C., survenue en août 2018. Cette séparation m’a anéantie. Que ce soit ma vision des gens, mon peu de confiance en moi, mes projections dans le futur. Je ne vois pas comment résumer la situation autrement. J’ai besoin d’un post entier pour en parler pleinement, exposer de A à Z les tenants et les aboutissants.
Toujours est-il qu’après 5 mois à me morfondre sur notre rupture, à regretter mon amour perdu et à m’embourber dans des études qui m’intéressaient de moins en moins, je partais en janvier 2019 à l’autre bout du monde, à plus de 9 000 km, à T., en Asie. Ce séjour compte certainement parmi les plus beaux souvenirs de ma vie. Phrase cliché, kitsch, bateau, mais vraie. J’en ai vu des paysages et des endroits nouveaux. J’en ai rencontré du monde, des inconnus compagnons d’un jour, des inconnus devenus amis. J’en ai appris des choses, j’ai ouvert plus d’une fois des yeux émerveillés. Mais C. était toujours là. Un fantôme tenace du passé, une idée impossible à déraciner. Je me surprenais parfois à lui parler, à lui écrire des lettres que je n’ai jamais envoyées et que je n’enverrai jamais, à lui raconter toutes ces choses que je vivais loin de lui, sans lui. C’est quel niveau de dépendance, à ce stade-là ?
Après 6 mois (seulement !), je suis revenue. Une seule envie : repartir. Quel choc de reprendre la vie telle qu’elle l’était avant cette escapade du bout du monde ! Le retour à la routine a été pesant. Terrible, même. Les gens ont un comportement de sauvages ici, en comparaison. Tu parles d’une Europe civilisée… Et puis, me retrouver dans ces endroits mille fois vus et visités, qui font tous écho à mes souvenirs avec C., une torture.
Quoi de nouveau, depuis mon retour ? J’ai rencontré quelqu’un, un type formidable que j’ai largué au bout de 5 ou 6 mois parce que rien n’est au point dans ma tête. J’ai rencontré une copine géniale qui part bientôt pour l’Allemagne. J’ai entamé et validé la dernière année de mon master. Qui s’est terminée de façon plutôt bancale il y a une semaine, mais elle s’est terminée.

Voilà, dans les grandes lignes.
Ai-je vraiment changé depuis ? Cette question m’obsède, depuis que j’ai redécouvert mes publications ici. Ne pas être capable de donner une réponse ou ne serait-ce qu’un semblant d’avis à cette question m’agace d’autant plus. Je ne peux pas vraiment demander à des amis non plus, car je me rends compte que même avec eux, je suis aussi scellée qu’une huître. Avec eux, je ne suis que bonne humeur, que douce folie et idées farfelues, que humour taquin, parfois cynique. Je ne suis tout bonnement pas capable de me confier. Est-ce grave, docteur ? Impossible en tout cas d’avoir un regard extérieur sur la question.
Encore une chose. Je me suis rendue compte d’un problème avec ma mémoire. Lorsque je plonge dans mes souvenirs, quels qu’ils soient, j’ai des difficultés à me rappeler des noms, des visages. Souvent, la chronologie est fausse. Parfois, de gros blancs ponctuent le tout : impossible de dire ce que je faisais à telle ou telle période, à tel ou tel moment. Quelques fois, je bloque sur cette incapacité à me rappeler et, effet boule de neige oblige, pendant un laps de temps, assez court fort heureusement, je me sens totalement perdue. Je n’ai alors qu’une envie : revivre ces instants perdus, retrouver les détails, combler les trous. Raison de plus d’écrire plus souvent, je suppose.